Journée internationale des Roms : Marijana et Patricija de Médecins du Monde se rendent chaque jour dans six communautés roms

En 2025, la communauté rom continue de subir des discriminations en raison de leur langue, de leur culture ou de leur situation socio-économique, ce qui freine leur accès aux soins de santé et leur qualité de vie. Depuis 2019, Médecins du Monde intervient au sein de six communautés roms dans le nord de la Croatie, pays où la population rom est estimée entre 30 000 et 40 000 personnes.

Patricija Bogdan et Marijana Sabo, collaboratrices du projet rom de Médecins du Monde en Croatie, expliquent leur action.

Quelles sont les initiatives de Médecins du Monde pour les communautés roms en Croatie ?


Marijana Sabo: Chaque jour, notre équipe mobile, composée d'une infirmière, d'une éducatrice et d'une médiatrice culturelle, se rend dans six communautés roms du nord de la Croatie, accompagnée de médecins ou de spécialistes selon les besoins.


Patricija Bogdan: Issue de la communauté rom, je sais combien il est crucial de maîtriser la langue, les coutumes et les besoins de cette population. Cela nous permet de jouer un véritable rôle de médiation et d'établir un lien de confiance. Nous orientons les membres de la communauté vers les services médicaux, psychologiques et sociaux adéquats et veillons à ce qu'ils bénéficient des soins appropriés.


Marijana : Il est impératif de souligner que notre projet dépasse le cadre médical. Nous aidons les personnes à accéder non seulement aux soins, mais aussi à l'emploi et à l'éducation, des facteurs déterminants pour leur santé et leur qualité de vie.


Patricija : Par exemple, nous facilitons actuellement l'inscription des enfants à l'école locale, une étape cruciale pour combler le retard scolaire souvent observé au sein de cette communauté. Nous assistons également les parents dans les démarches administratives et vérifions le statut vaccinal des enfants.

Huisbezoeken in de Romagemeenshap in Kroatië door Dokters van de Wereld

Pourquoi avoir mis en place ce projet ?


Patricija : Comme l'a mentionné Marijana, je viens de la communauté rom et je travaille depuis quatre ans chez Médecins du Monde. Grâce à mon expérience, je mesure l'importance de construire un lien de confiance solide. Au début, cela prenait des mois. Aujourd’hui, on nous sollicite à tout moment, même virtuellement. Ce sentiment de confiance est unique.


Marijana : Nous passons beaucoup de temps à construire ce lien : chaque jour, nous nous rendons dans les communautés et effectuons des visites individuelles à domicile. Nous nous intéressons à leur milieu de vie.


Patricia : Les roms ont toujours été confrontés à la stigmatisation, à la discrimination, ainsi qu'à des obstacles linguistiques, culturels et socio-culturels. Il n'est donc pas surprenant qu'ils se méfient de toute initiative extérieure. Grâce à ce projet, nous devenons un lien entre "le système" et la communauté. Notre présence sur le terrain, en tant que Médecins du Monde, est unique et précieuse.

Nous passons beaucoup de temps à construire ce lien : chaque jour, nous nous rendons dans les communautés et effectuons des visites individuelles à domicile. Nous nous intéressons à leur milieu de vie.

À quels problèmes et pathologies la communauté rom est-elle confrontée ?

Marijana:  « Nous constatons toujours l’impact mental de l’épidémie Covid. Comme ailleurs, les besoins en soins ont augmenté, notamment pour les enfants qui n'ont pas pu suivre l'enseignement à distance suite à un manque de matériel informatique. Cela a entrainé un isolement accru des jeunes roms, des problèmes mentaux ou des grossesses involontaires. Certains jeunes se sont tournés vers les drogues. Pour y remédier, nous collaborons avec les services publics afin de fournir des soins liés aux addictions. »

Patricija: « Quant aux personnes âgées, il s'avère que deux tiers des plus de 65 ans au sein de la communauté rom souffrent de maladies chroniques, et qu’elles sont confrontées à de nombreux obstacles pour avoir accès aux soins. Nombreuses d’entre elles sont illettrées et ne peuvent prendre rendez-vous avec un spécialiste. Elles ont difficilement accès à un ordinateur, ne connaissent pas leurs droits en matière de soins de santé. Nous fournissons donc des soins paramédicaux (comme la prise de la glycémie ou de la tension artérielle), et un soutien ‘social’ : nous les informons de leurs droits, les aidons à prendre des rendez-vous médicaux et discutons ensemble des prescriptions. »

Marijana pendant une visite dans un village rom en Croatie

Pourquoi ce projet met-il l'accent sur l'autonomisation et l'émancipation ?


Marijana: « Il est crucial de renforcer la position des jeunes filles et des femmes au sein de la communauté rom. La contraception reste souvent tabou et les grossesses non désirées, même chez les adolescentes, persistent. Il est essentiel que les filles et les femmes apprennent à affirmer leurs limites et soient informées au sujet de leur sexualité. Nous organisons donc des ateliers sur la contraception et l'affirmation de soi, facilitons l'accès à la contraception, à l'éducation, à la planification familiale et intervenons en cas de violence domestique. 

Par ailleurs, nous voulons que les enfants et les jeunes filles fréquentent l'école. L'éducation est la clé d'une vie meilleure et contribue à réduire les grossesses adolescentes, la consommation de drogues et à renforcer la résilience mentale.

Patricija: Ce projet embrasse la santé de manière holistique, rendant notre approche unique et efficace. Notre travail repose sur de petites actions qui améliorent le quotidien des familles roms, et par extension, celui de toute la communauté. Aujourd'hui même, j'ai aidé une femme à élaborer son dossier de pension alimentaire, rédigé des CV, aidé au sujet des inscriptions des enfants à l'école et vérifié leur statut vaccinal. 

Soins paramédicaux pour la communauté rom en Croatie par Médecins du Monde

Quelles sont les principales difficultés de votre travail ?


Patricija : « Il est parfois difficile de ne pas juger certaines dynamiques familiales. Je persiste néanmoins à les accompagner et à encourager les comportements positifs. Grâce à notre approche inclusive, nous sommes aujourd'hui la seule organisation qui visite les communautés sans la présence de la police, ce qui nous assure la confiance de la communauté. »


Marijana : « Effectivement, la communauté nous protège. Nous ne ressentons jamais d'insécurité et, après six ans, nous sommes devenues une partie intégrante de cette communauté. »

 


 

Médecins du Monde est membre du Consortium 12-12, CNCD, RE et Donorinfo.

Contactez-nous

Médecins du Monde

Faites un don : BE26 0000 0000 2929


Rue Botanique 75, 1210 Bruxelles
Tél : +32 (0) 2 225 43 00
info@medecinsdumonde.be

TVA: BE 0460.162.753